Association américaine de protection des consommateurs depuis 1936, Consumer Reports vient de publier une enquête concernant la viande de bœuf hachée vendue aux quatre coins des États-Unis, mais également exportée dans d'autres pays ; les États-Unis étant l'un des principaux exportateurs de viande de bœuf au monde avec le Brésil, l'Australie ou l'Argentine. Les résultats de cette étude sont de ce fait également applicables aux exportations vers les marchés japonais, canadien, mexicain, sud coréen et hongkongais. Cinq des plus gros clients des États-Unis ayant importé, à eux seuls, pas moins de 488 761 tonnes de viande de bœuf et de veau en 2012, selon l'association nationale des vachers américains.
Paraissant être à des milliers de kilomètres des préoccupations des Français, ce problème pourrait toutefois les concerner dans les prochaines années, si le Traité de libre-échange entre l'Union européenne et les États-Unis (TAFTA) est signé, à condition que les pratiques autorisées aux États-Unis le deviennent aussi au sein de l'Union européenne, comme le souligne une vidéo du blog Les Décodeurs du journal Le Monde.
Après que 13,5 tonnes de viande hachée susceptibles d'être contaminées à la bactérie E.coli aient été rappelées peu avant le 4 juillet dernier, Consumer Reports s'est penché sur la composition bactérienne du bœuf haché aux Etats-Unis. Mais pour bien comprendre le problème, il est tout d'abord nécessaire de présenter les différents modes de production de bœuf aux États-Unis.
Premier cas : la viande labellisée « organic ». Elle reste assez proche de l'appellation agriculture biologique pratiquée dans l'Union européenne. Elle est ainsi définie par le ministère américain de l'Agriculture (USDA) comme provenant d'élevages pratiquant l'agriculture raisonnée, n'utilisant pas ou très peu de pesticides et d'engrais chimiques. Du matin au soir, les animaux peuvent gambader ou ruminer dans des pâturages certifiés, de leur naissance à leur mort, sans jamais avoir connu la moindre dose d'hormones de croissance ou d'antibiotiques. Quant aux compléments en fourrage ou en céréales, ils proviennent obligatoirement de cultures biologiques, donc sans OGM.
Jusque là tout va bien. Sauf qu'une nouvelle appellation vient chambouler toute la logique : le natural beef, que l'on pourrait traduire par bœuf naturel ou plutôt bœuf nature. Car le ministère de l'Agriculture américain applique, selon sa propre définition, le terme de naturel à " un produit ne contenant pas d'ingrédients artificiels ou de colorants et ayant été le moins possible transformé ". Mais cela ne " garantit pas que la source du produit n'ait pas reçu des hormones et/ou un traitement à base d'antibiotiques ". Une appellation qui est donc loin de faciliter la tâche au consommateur voulant choisir, de façon certaine, une viande provenant d'un élevage plus responsable.
Mais la majorité écrasante de la viande vendue dans les supermarchés provient d'élevages dits conventionnels (conventional). Dans cette catégorie, presque tous les coups sont permis pour réduire les coûts et la durée nécessaire pour achever la production, à commencer par le dopage des animaux aux hormones de croissance. Enfermés dans quelques mètres carrés d'enclos sans pouvoir brouter d'herbe durant la plus grande partie de leur croissance, ces bœufs tombent plus facilement malades, conduisant les éleveurs à utiliser des antibiotiques, laissant ensuite des traces dans le produit fini.
En revanche, dire que les animaux élevés en conventionnel ne voient jamais la lumière du jour reviendrait à mentir. Au minimum, ils feront un passage dans des pâturages lors de leur première année avant de rejoindre des bâtiments où ils seront enfermés dans quelques mètres carrés, dont le sol devient rapidement boueux. Un environnement propice au développement des bactéries, tout comme celui des feedlots, appelés parcs d'engraissement (voir photo ci-dessus). Dans ces grands enclos sont entassées des centaines de bêtes dans le but de réduire le temps d'élevage de quelques mois. Parfois, le sol est recouvert d'herbe. Souvent, il n'est que sable et poussière. Alors qu'en France l'installation de La ferme des Mille vaches pose débat, le rapport de Consumer Reports souligne qu'aux États-Unis, " le parc d'engraissement moyen compte 4 300 têtes de bétail. […] Les plus gros d'entre eux atteignant en moyenne 18 000 têtes ".
Pour gaver ces animaux de manière efficiente, les agriculteurs leur servent alors des menus à base de fourrage, de soja et de maïs. Et quand ce dernier vient à manquer à cause de la sécheresse sévissant aux États-Unis depuis 2010, son prix grimpant en flèche, certains agriculteurs peu scrupuleux se tournent vers des alternatives inimaginables. Riz, cacahuètes, restes de poulets et de porcs provenant des abattoirs, chocolats, sucre, oursons en gélatine, bonbons et autres confiseries. Certains éleveurs ne reculent devant rien " pour gagner 2 ou 3 cents " comme s'en défendait l'un d'eux devant la caméra de CNN en 2012. Avec ce système, Reuters souligne qu'il est alors possible d'économiser 10 à 50 % des dépenses habituelles engendrées par l'achat de maïs.
Pour son étude, le site Consumer Reports s'est donc attardé sur le cas de la viande venant d'élevage conventionnel et de troupeaux élevés de manière plus responsable. Ces derniers sont alors considérés comme se rapprochant de l'agriculture responsable s'ils remplissent l'une de ses conditions, à savoir la non-utilisation d'hormones de croissance, d'antibiotiques ou l'élevage des animaux dans les pâturages. Nous les appellerons ici élevages raisonnés.
Sur les 300 échantillons testés, l'association de consommateurs a ainsi détecté des bactéries Enterococcus liées à la présence de matières fécales dans presque 100 % des échantillons de viande conventionnelle et dans plus de 95 % des échantillons d'élevages raisonnés. La bactérie E.coli se retrouve également dans près de 60 % de la viande conventionnelle contre moins de 40 % dans les élevages raisonnés. Autre invité dans plus de 50 % de la viande conventionnelle : le staphylocoque doré, responsable de nombreuses pathologies chez l'homme dont certaines sont mortelles. Quant à la salmonella, bactérie valant à un produit européen d'être retiré du marché, car provoquant des intoxications et des fièvres typhoïdes parfois mortelles, elle est heureusement presque inexistante, mais vivote dans plus de 2 % des échantillons.
Plusieurs raisons à ces contaminations massives sont avancées, à commencer par la gestion des élevages conventionnels et l'abattage des troupeaux. Dans les feedlots, les animaux baignent dans leurs propres déchets, le fumier à leurs pieds devenant un lieu de développement parfait pour les bactéries. Si les bœufs issus d'élevages biologiques sont tués dans de petits abattoirs régionaux, le reste des bêtes passe par les mêmes abattoirs appartenant à 4 grandes entreprises et dans lesquels plus de 400 têtes peuvent tomber par heure, laissant une large ouverture aux dérives sanitaires. C'est entre autres à ce moment-là que les bactéries voyagent et se retrouvent dans la viande, bien que les abattoirs utilisent plusieurs méthodes pour les éliminer.
Selon Consumer Reports, les techniques utilisées incluent entre autres le passage des carcasses à " l'eau chaude, des lavages à base de chlore ou d'acides lactiques ". Des procédés également appliqués aux tendons, cornés et autres déchets transformés en pink slime, une pâte rose ressemblant à du chewing-gum dont la présence a été détectée dans 70% de la viande hachée vendue dans les supermarchés américains en 2012. Autorisée à hauteur de 15% du volume total de la barquette par le ministère de l'Agriculture américain, ce substitut de viande est interdit dans l'UE.
Si de nombreuses bactéries se retrouvent à la surface de la viande et seront éradiquées durant la cuisson de pièces entières, le phénomène diffère avec la viande hachée. Dans ce cas, les bactéries en surface sont mélangées durant le hachage et se retrouvent aussi bien en surface qu'au centre du steak haché, rendant impossible l'élimination totale durant la cuisson. En conclusion, Consumer Reports conseille de ce fait aux Américains de choisir en priorité de la viande issue de l'agriculture biologique. Quant aux consommateurs français, ils ne sont pas exposés, pour le moment, à ce type de pratiques alimentaires ni à la viande produite par les élevages conventionnels américains. Mais cela pourrait prochainement changer avec le TAFTA.
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