Connu pour son initiative anti-gaspillage réhabilitant les fruits et légumes " moches ", le collectif de producteurs à l'origine des Gueules Cassées continue son développement en replaçant le consommateur au centre de la production des produits alimentaires vendus dans la grande distribution. Évitant que des produits ayant gardé toutes leurs saveurs finissent à la poubelle avant même d'avoir atteint les rayons des magasins, le logo de la pomme édentée est devenu un modèle suivi dans d'autres pays comme le Japon, les États-Unis, l'Angleterre ou l'Allemagne.
Ne se reposant pas sur le succès de son opération, le collectif revient cette année avec le second volet du projet : La Marque du Consommateur. Fort de l'implication des consommateurs dans l'aventure des Gueules Cassées, le collectif proposera prochainement aux citoyens de devenir consomm'acteur et de créer les produits alimentaires qui leur ressemblent.
À l'heure où les consommateurs sont de plus en plus en demande de produits sains, qualitatifs, mais aussi respectueux du travail des producteurs, de l'environnement ou du bien-être animal, la Marque Du Consommateur se présente comme une première réponse à la réappropriation des produits de grande consommation par les consommateurs. En effet, ceux-ci ne sont pas invités à choisir parmi un panel de produits proposés par les grandes marques et répondant plus ou moins à leurs critères. " Des produits que tout le monde achète sans savoir ce qu'ils contiennent vraiment ", précise Nicolas Chabanne, fondateur des Gueules Cassés et de La Marque du Consommateur, lors d'une conversation téléphonique.
Cette fois, les consommateurs sont invités à concevoir et à " acheter un produit dont on sait tout ". À partir de sa plateforme qui ouvrira dans les prochaines semaines, La Marque du Consommateur propose à chaque Français de " renverser le modèle économique " actuel en créant le cahier des charges de produits alimentaires qui se retrouveront peut-être dans les rayons des supermarchés, estampillés du logo C'est qui le patron ? Lors du test effectué pendant 2 ans, les internautes découvraient ainsi la composition complète d'une pizza et pouvaient la métamorphoser selon leurs envies et leurs exigences. Fromage reconstitué ou fromage frais produit localement ? Tomates fraîches issues de l'agriculture biologique ou issues de l'agriculture intensive ? Pâte cuite au feu de bois ou pâte classique ? Au fil de leurs choix, ils voyaient alors évoluer le prix du produit fini, affiché sur le côté de la page.
Si cela n'est pas sans rappeler la composition de pizza dans un restaurant, la différence réside dans le choix des ingrédients et des méthodes de production employées. Pour certains, l'impact environnemental sera primordial quand pour d'autres le critère principal sera l'origine des produits. C'est au " consommateur de choisir ses critères " de fabrication. En somme, l'équipe de La Marque du Consommateur lancera la production des produits " quand un nombre suffisant de contributeurs aura validé un cahier des charges commun ". Dès lors, celui-ci sera porté auprès de producteurs et de fabricants compétents pour répondre aux critères exigés par les consommateurs, ceux-ci concernant aussi les emballages et le packaging (poids net, nombre de portions, étiquetage ...).
Alors que les Gueules Cassées remet en rayon les délaissés du calibrage industriel, La Marque du Consommateur pourrait alors devenir une marque partenaire, écoulant les produits déformés résultant de ses chaînes de production. Mais pour Nicolas Chabanne, cette association ne verra pas le jour. " Si on élargit le cahier des charges, il n'y aura plus de Gueules Cassées ". En effet, le producteur s'appuie sur le succès de ce label devenu international pour balayer le calibrage, une pratique très largement appliquée dans l'industrie alimentaire. Celle-ci consiste à jeter les produits ne répondant pas aux critères de taille ou de forme imposés aux fabricants par les marques, afin d'atteindre une uniformisation et une standardisation parfaites. Un biscuit cassé ou une clémentine difforme ne seront pas commercialisés faute de convenir aux exigences précises des marques se jouant parfois au millimètre près. Ainsi, le client aura toujours des céréales de même taille et de même couleur ou un camembert parfaitement rond.
Pourtant, si les industriels semblent attachés à ces méthodes de calibrage, la suite de la campagne de financement des céréales et des camemberts Gueules Cassés sur Kiss Kiss Bank Bank a démontré une tout autre réalité. " 100 000 camemberts ont été vendus en 8 mois ", sans campagne de pub payée ou " de communication de la part de Carrefour ", qui les commercialisait. Les produits de La Marque du consommateur deviendront ainsi " les premiers produits normaux avec des Gueules Cassées ", afin de limiter le gaspillage alimentaire.
Un collectif de producteurs étant à l'origine du projet des Gueules Cassées, il serait impensable de laisser ces professionnels de l'alimentation dans l'ombre de la Marque du Consommateur. Si la direction espère que les producteurs partenaires des Gueules Cassées ne représenteront que " 0,01 % de la liste des producteurs " travaillant avec la nouvelle marque, c'est avant tout pour laisser les consommateurs proposer des producteurs dont ils connaissent le travail, les produits et le savoir-faire. " Chacun pourra également sourcer et proposer sa team de producteurs, petits fabricants et bons produits à valoriser ". De même, l'enseigne mettra l'accent sur la compréhension de leurs différentes méthodes de travail et les répercussions qu'elles ont sur la qualité des produits, pour permettre au consommateur de comprendre le coût de production réel.
Communiquant d'ores et déjà sur sa future brique de lait, elle prévoit de combler les 3 centimes par litre de lait manquant aux agriculteurs pour vivre " dignement de leur métier ", peut-on lire sur la page Facebook de la marque. " Depuis des années, tout le monde tourne en rond et se renvoie la balle en laissant des milliers de producteurs français dans une détresse inimaginable. Personne ne bouge ? Nous, les consommateurs, nous allons le faire ! "
Confiant quant à l'avenir de cet ovni dans le monde de la grande distribution, Nicolas Chabanne parie sur " un succès aussi grand que celui des Gueules Cassées " et un service consommateur peu sollicité grâce à une transparence totale sur la production. " Ce sera la première marque qui ne subira pas les réactions du consommateur ", si ce n'est celle des personnes n'ayant pas accès à internet et donc à la totalité du processus décisionnaire.
Malgré cela, le projet " vient se fixer sur une attente forte du consommateur " tout en lui redonnant le pouvoir de création et de contrôle sur des produits de grande consommation. " Les consommateurs savent ce qu'ils veulent et surtout ce qu'ils ne veulent plus ! Ils vont enfin pouvoir le dire et participer à la création de leur propres produits en ayant une influence directe sur ce qu'ils consomment". Tout comme les marques de distributeur (MDD) ont su s'imposer dans les supermarchés, le modèle de la Marque Du Consommateur - dont l'acronyme MDC ne serait que pure coïncidence - pourrait progressivement se faire une place dans la grande distribution. " C'est tellement puissant le pouvoir du consommateur ", qu'on aurait tort de s'en priver.
* Images extraites du site et de la page Facebook La Marque du Consommateur
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